Pour la première fois, la Suisse a accueilli la cérémonie des European Film Awards, remise des prix qui se passe tous les deux ans à Berlin (le siège de la European Film Academy) et tous les deux ans dans une autre ville européenne, toujours différente. Il y avait donc une forte présence helvétique lors de cette 37e édition, qui a eu lieu au KKL à Lucerne. Clap était présent à l'événement. Notre chroniqueur Max Borg se trouvait parmi les invités de cette édition.
À l’instar des Oscars, il y avait un animateur principal –le comédien Fernando Tiberini, qui maîtrise huit langues et en a appris d’autres pour s’adresser à toutes les personnes qui donnaient ou recevaient un prix– et des présentateurs-trices pour les différentes catégories.
Et comme à Hollywood, ce fut le seul vrai bémol de la soirée, en raison de personnes qui ne s’étaient pas suffisamment préparées et de tentatives d’humour aux prémices très faibles.
C’est devenu particulièrement lourd vers la fin, alors que tout le monde attendait la fête dînatoire après la cérémonie (qui s’est terminée après 23h).
Côté prix, on constate qu’Emilia Pérez de Jacques Audiard a fait l’unanimité, puisqu’il a remporté tous les prix principaux pour lesquels il était éligible: meilleur film, mise en scène, scénario, actrice (Karla Sofía Gascón). Il a aussi reçu un prix pour le montage, qui entrait dans le sous-groupe «Excellence», dirigé par un comité spécifique. C'est de bon augure pour le parcours de ce film musical en ce qui concerne les Oscars (il représente la France et vise aussi les catégories régulières, avec l’appui promotionnel de Netflix), mais nous trouvons dommage que d’autres titres excellents, comme The Girl With the Needle ou Les graines du figuier sauvage n’aient rien gagné. Ce qu’Audiard a reconnu, d’ailleurs, en s’excusant chaque fois qu’il montait sur scène.
La France a aussi eu le prix du meilleur acteur, pour la prestation d’Abou Sangare dans L’histoire de Souleymane de Boris Lojkine. Un prix accepté à distance, puisque la condition juridique du jeune comédien, qui correspond à celle du personnage, ne lui permet pas de quitter la France pour l’instant.
Il s’agit d’une œuvre qui avait inauguré son parcours à Cannes dans la section Un Certain Regard, comme l’ont fait deux autres films lauréats de la soirée : le dessin animé letton Flow (qui a donc battu Sauvages de Claude Barras dans la catégorie de l’animation), et le drame norvégien Armand, qui a remporté le prix Discovery du meilleur premier long métrage. Le réalisateur Halfdan Ullmann Tøndel a remercié sa famille, sans souligner l’aspect symbolique de sa victoire: il est le petit-fils de Liv Ullmann et Ingmar Bergman, et ce dernier fut le premier président de la European Film Academy.
Son successeur, Wim Wenders, a reçu un prix pour l’ensemble de sa carrière (tout comme Isabella Rossellini), et il a profité de son discours pour faire l'éloge de la nature communautaire du cinéma et des organisations liées à cet art, dont cette académie qui a pour but la mise en valeur du cinéma européen sans discriminations d'aucune sorte (bien qu'en 2022 le comité décida exceptionnellement d’exclure les productions russes, comme le firent alors plusieurs festivals).
Flow, No Other Land (meilleur documentaire) et L’histoire de Souleymane sont toujours à l’affiche en Suisse romande, tandis qu’Armand sortira le 5 mars. The Remarkable Life of Ibelin, autre production norvégienne, lauréate du prix décerné par le jury des jeunes, est disponible sur Netflix.
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